Les recherches sur Honoré Cotte ont été longues et n’ont pas permis de connaitre les conditions de son décès.
Vous trouverez ci-dessous les démarches et recherches effectuées, en espérant que de nouveaux chercheurs s’attellent à la tâche.
Pour orienter nos recherches nous sommes partis de quelques éléments donnés par les personnes qui l’ont connu à Étoile-sur-Rhône, ce qui forme la « mémoire collective » : un jeune, un peu plus de 20 ans. Aucune piste n’a été négligée.
1-Honoré Cotte est né à Étoile-sur-Rhône ?
Mais voilà, aucune trace de naissance entre 1920 et 1925 (et même en deçà ou au-delà de ces dates) dans le registre des naissances de la commune d’Étoile-sur-Rhône.
2-Honoré Cotte né à Valence ?
Aucun Honoré Cotte n’est né à Valence d’après les registres de naissance entre 1920 et 1925.
Nous avons poussé nos recherches dans les recensements de Valence.
Que ce soit dans le recensement de 1926, 1931 ou de 1936 de la ville de Valence, il n’y a aucun Honoré Cotte.
3-Honoré Cotte habitait à Étoile-sur-Rhône ?
Honoré est un jeune homme que quelques jeunes étoiliens ont connu et qui est de leur âge, nos recherches dans les recensements débutent en 1921.
Dans la Grande rue, il y a le chef de maison Henri Cotte, né en 1892 à Saint Péray, forain. Habitent dans la même maison son frère Marcel, né en 1904 à Valence, sans profession et Eugénie Michelot, née en 1899 à Beaucaire, ouvrière foraine.
Henri Charles (pour être complet) Cotte est le fils de Jules François Honoré Cotte (retenez le prénom Honoré) et de Sophie Courbis. Son frère Marcel Cyprien est né en 1906 à Valence (pas en 1904 comme indiqué au recensement). Le père d’Eugénie Michelot est chanteur ambulant, sa mère sans profession, Eugénie est née au hasard des déplacements dans le département du Gard.
Au recensement de 1926, au lieu-dit Véore, dans la maison d’Henri Charles Cotte, il y a son frère Marcel (né cette fois en 1906) et Eugénie Michelot, non parente. Tous deux employés d’Henri sont déclarés « forains ». Henri déclare son entreprise en février 1923 « vente de vaisselle, forain », il est à cette date célibataire.
La composition de la famille Cotte n’a pas changé depuis 5 ans
Au recensement de 1931, à la Véore, sortie d’Étoile-sur-Rhône, la maison Henri Cotte compte quatre personnes en plus du chef de maison. Eugénie Michelot (domestique) est l’employée d’Henri, il y a un Honoré Cotte né en 1924 à Valence, fils d’Henri. Marcel Cotte frère d’Henri, et Rosa Gagneux belle-sœur d’Henri (les liens de parenté sont toujours donnés par rapport au chef de maison).
C’est la première fois, au recensement de 1931, qu’apparait Cotte Honoré, ce qui soulève trois remarques : Honoré aurait dû être au recensement de 1926 de Valence puisqu’il est déclaré né en 1924 à Valence. Il est présenté comme le fils d’Henri et nous ne savons pas qui est réellement sa mère. Le point le plus important est qu’il ne figure pas dans le registre des naissances de Valence en 1924 ni à une autre date.
Au recensement de 1936 d’Étoile-sur-Rhône, il y a neuf personnes dans la maison de Charles Cotte (vous avez remarqué, parfois Henri, ou Charles ou Henri Charles pour la même personne) :
- Eugénie Michelot : épouse,
- Henri Cotte, né en 1933 à Étoile-sur-Rhône : fils (qui sera plus connu par la population par le surnom de Riri),
- Honoré Cotte, né en 1923 à Valence : fils.
- Rosa Gagneux : belle-sœur,
- Marcel Cotte : frère,
- Charles Cotte, né en 1931 à Étoile-sur-Rhône : neveu,
- Pierre Cotte, né en 1933 à Étoile-sur-Rhône : neveu,
- Eugénie Cotte, née en 1935 à Étoile-sur-Rhône : nièce.
Que de changements en 5 ans, 4 enfants nouveaux !
Dans la maison d’Henri Charles Cotte nous pouvons penser qu’il y a deux familles distinctes. Marcel, marié à Rosa, a trois enfants : Charles, Pierre et Eugénie, tous trois nés à Étoile-sur-Rhône. Quatre autres personnes qui ressemblent à une famille mais posent question : Eugénie est-elle l’épouse d’Henri Charles ? Sur l’acte de naissance d’Eugénie il n’y a aucun mariage d’indiqué dans la marge, et l’acte de décès en 1947 aucune mention d’un époux. Honoré est-il vraiment le fils d’Henri Charles, et qui est sa mère ? Aucun document administratif ne permet de préciser les liens directs entre Henri Charles et Honoré.
La lecture des quatre années de recensement d’Étoile-sur-Rhône ne fait qu’ajouter des doutes à des incertitudes. Nous avons chaque fois confronté les informations recueillies aux actes de naissance et de décès, ce qui confirme que les recensements sont à prendre avec précaution.
4-Honoré Cotte a fréquenté l’école d’Étoile-sur-Rhône ?
Remerciements appuyés aux directeurs successifs de l’école primaire des garçons de la commune d’avoir conservé les registres des élèves présents, mais voilà : il n’y a pas d’Honoré Cotte. À la rentrée du 5 octobre 1931 est inscrit Eugène Cotte, né le 19 avril 1923 à Valence, fils de Gabriel Cotte. Nous vous rappelons que c’est en 1931 que le nom d’Honoré Cotte apparait pour la première fois sur le recensement d’Étoile-sur-Rhône, mais point d’Eugène recensé.
Bien que personne ne se souvienne de lui Eugène est à l’école avec des garçons d’Étoile-sur-Rhône comme Michel Planas, René Rey et André Marquet qui ne connaissent qu’Honoré.
5-Et si Honoré Cotte était Eugène Cotte ?
Eugène quitte l’école le 19 avril 1937, jour anniversaire de ses 14 ans, pour aller travailler dans les champs.
Sur le registre de l’école il a été rajouté dans la colonne « OBSERVATIONS » : Tué au « maquis » en 1944. Nous allons suivre la piste Eugène Cotte.
6-Qui est Eugène Cotte ?
À ce point du récit nous vous demandons une attention particulière !
Le 19 avril 1923, à Valence, Marcelle Marie Marthe Dupont met au monde un garçon qu’elle prénomme Eugène (un seul prénom pour ce garçon) et a défaut de père déclaré l’enfant garde le nom de Dupont.
Le 4 juin 1925 Eugène ainsi que son jeune frère Antoine Marcel Jules sont reconnus par Gabriel Eugène Cotte, nous comprenons mieux le prénom donné à Eugène. Eugène Dupont prend le nom de Cotte. Gabriel Cotte meurt à la fin de 1926 laissant deux enfants orphelins. Gabriel Cotte et Marcelle Dupont n’ont jamais été mariés.
7-Cette situation dure quelques années, jusqu’au mariage de Marcelle Dupont avec Joseph Pierre Mourier en 1934 qui, à l’occasion de ce mariage, reconnait les deux enfants Dupont (acte de reconnaissance établi quelques heures avant le mariage). Les enfants Dupont, un temps enfants Cotte, deviennent Mourier.
Le registre de l’école n’est pas modifié. Comme nous l’avons vu plus haut, le directeur inscrivait des informations bien après la sortie de l’école et s’il avait été informé de ce changement de patronyme (Eugène est à l’école jusqu’en 1937) il aurait, sans aucun doute, apporté cette modification. Autre bizarrerie, quand Eugène entre à l’école d’Étoile-sur-Rhône en 1931, son père Gabriel est déclaré comme représentant légal de l’enfant bien que son décès remonte à 1926 ?
8-Qui est Gabriel Eugène Cotte ?
Gabriel Eugène Cotte est né le 27 février 1900 à Valence. Fils de Jules François Honoré Cotte et Sophie Courbis, Gabriel est le frère d’Henri Charles et Marcel Cotte, tous deux habitent à Étoile-sur-Rhône. De santé fragile, il est exempté de service militaire et décède dans sa 27ème année.
9-Dupont-Cotte-Mourier, Eugène-Honoré ?
Nous sommes tentés de convenir qu’Honoré Cotte est en fait Eugène Mourier !
Pour qu’aucune information ne nous échappe, toutes nos recherches qui vont suivre seront pour Eugène Dupont, Honoré Cotte, Eugène Cotte et Eugène Mourier.
10-Dans les archives départementales de la Drôme ?
En 1955, André Vincent-Beaume réalise des listes de personnes mortes du fait de la guerre 39-45 suivant les renseignements collectés de différentes sources, et particulièrement des maires des communes de la Drôme. Deux documents (132J1 et 132J2) regroupent l’ensemble des déclarations communales.
A-Liste par commune :
Des personnes qui y ont été tuées ou arrêtées, sauf les victimes des bombardements.
Des personnes domiciliées dans la Drôme ou qui y avaient trouvé asile, qui sont décédées par suite de faits de guerre.
B-Liste alphabétiques des tués ou décédés :
De l’armée régulière (AR).
Des forces françaises de l’intérieur (FFI).
Des déportés dans les camps de concentration (D).
Des internés fusillés ou massacrés (I).
Des requis au Service du Travail Obligatoire (STO).
Des victimes civiles (VC).
Dans ces deux ouvrages nous trouvons (en ce qui concerne Honoré Cotte) :
Cotte Honoré est classé une fois (AR) comme faisant partie de l’armée régulière.
D’autres documents (132J60) rassemblent la liste des drômois tués dans le département et aussi dans l’Ain, l’Ardèche, Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Isère, Rhône et Vaucluse, dans toutes ces listes aucun nom : aucun Dupont, Cotte ou Mourier n’apparait.
Que ce soit aux archives militaires de Caen : personnes militaires ou civiles mortes pour la France, ou à Pau : carrières militaires, aucune trace de Cotte Honoré ou Mourier Eugène.
11-Honoré Cotte, résistant, tué en Ardèche ?
C’est une affirmation, dans la mémoire collective, pour expliquer la présence d’Honoré sur le monument aux morts de la commune. Les maquis en Ardèche regroupent des résistants venants des départements limitrophes et parfois loin du département, et lors des accrochages avec les soldats allemands il y eut de nombreux morts, principalement en 1944. Parfois il a été difficile de reconnaitre les corps et plusieurs inconnus sont inscrits dans les registres de décès des communes.
Il y a 339 communes en Ardèche, par où commencer ? Nous commençons par des demandes aux communes le plus souvent citées comme lieux de confrontations, sans résultat. Nous avons élargi aux autres communes du département : dans aucun des registres de décès des 339 communes n’est inscrit le décès d’Eugène Dupont ou Honoré Cotte ou Eugène Mourier !
12-Honoré Cotte tué au Pouzin ?
Le Pouzin est une commune de l’Ardèche de 1500 habitants (en 1939), au bord du Rhône, traversé par la nationale 86 qui longe la rive droite du fleuve.
Il y a aussi la voie ferrée qui emprunte le même parcourt et est particulièrement utilisée pour le transport de marchandises. Il y a un important dépôt de carburant de la Société « La Mure ».
Le 1er juin 1944 un groupe de résistants parvient à voler, avec une certaine facilité, un camion avec 3000 litres d’essence.
Cela donne des idées à un groupe de maquisards qui espère renouveler l’exploit. Le 16 juin au soir deux détachements de FTPF de Lamastre (Francs-Tireurs et Partisans Français) entrent en action. Mais cela ne se passe pas comme prévu lors des repérages, les soldats allemands et les GMR (Groupe Mobile de Réserve) les attendent et prennent l’initiative des premiers tirs. Le bilan est tragique !
28 volontaires font partie de l’expédition : 3 seulement sont sortis indemnes, 7 blessés s’en sortent, 4 blessés décèdent pendant leur évacuation. Les autres (14 blessés et prisonniers) sont fusillés.
Lors de la levée des dépouilles, le lendemain matin, aucun document d’identité ne fut trouvé sur les corps mutilés. Est-ce que les jeunes sont partis de Lamastre sans papier ? Est-ce que les allemands et les GMR, avant de les fusiller, font disparaitre toutes possibilités de reconnaissance ?
Chaque corps allongé sur une civière est pris en photographie. Numérotées de 1 à 14, elles sont jointes à la déclaration des décès, pour permettre les recherches ultérieures.
De fin 1944 à fin 1954, le tribunal civil de Privat prononcera 10 rectifications de déclaration de décès, à la demande des familles. Pour les 4 autres décès le document porte un nom, écrit au crayon, dans la marge, suivi d’un point d’interrogation.
Est-ce qu’Honoré Cotte est l’un des leurs ?
13-Eugène Mourier « parti Isère »
Un document manuscrit liste les jeunes de la commune d’Étoile-sur-Rhône, nés en 1923, en âge de partir aux chantiers de jeunesse ou qui sont déjà aux chantiers.
Ceux qui sont en cours de chantiers : André Bard, Henri Blachier, Édouard Fayer, Louis Jacquamet, Camille Lespet, Albert Rouveur, René Rey (d’août 1943 à Mars 1944), Michel Planas (de novembre 1943 à mai 1944) et Séraphin Héritier.
Ceux qui sont encore employés dans des fermes : Jean Durand (chez Serre) avait devancé son départ aux Chantiers, Marcel Levet et Eugène Mourier (chez Fayolle). Jacques Pétillat et Paul Robin ont quitté leurs patrons. Des jeunes se souviennent bien d’avoir fait les moissons avec Honoré Cotte chez Fayolle, ce qui confirme qu’Honoré ou Eugène est la même personne.
En dessous d’Eugène Mourier est inscrit « parti Isère ». Il apparait qu’Eugène préfère quitter son patron et se cacher plutôt que de partir aux chantiers. Alors serait-il mort en Isère ?
Les 529 communes de l’Isère ont été contactées, aucune n’a l’un des trois noms, Dupont, Cotte ou Mourier, dans les registres de décès entre 1943 et 1945.
14-Et dans la Drôme ?
Toutes les communes (et bien au-delà) où il y eut des affrontements ont été contactées, là encore il n’y a rien dans les registres des décès.
Hypothèse
Le père d’Eugène Cotte est décédé, sa mère fait les marchés et l’enfant est en âge d’être scolarisé. L’oncle d’Eugène, habitant Étoile-sur-Rhône, le recueille et l’inscrit à l’école. Mais pourquoi prend-il le prénom usuel d’Honoré ? Lors des recensements, la famille Cotte étant souvent absente, c’est la mémoire populaire qui est transcrite.
Par l’inscription sur les plaques des monuments aux morts en 1948, Honoré Cotte s’est figé dans les mémoires. Il ressemble à cet enfant qui joue avec ses camarades d’école, ou ce jeune homme qui va de ferme en ferme pour proposer ses services. Un peu taciturne, ne se mélangeant pas avec les autres, peut-être moqué pour sa marginalité, d’amis : point.
Cette affirmation « Cotte Honoré combattant mort pendant la guerre », inscrite dans le marbre, est reprise à chaque enquête, sans que soient réalisées des recherches plus approfondies : de 1947 à 1960 il existait beaucoup plus de témoins !
En avril 1960, ce sont les directeurs d’écoles qui sont sollicités par le département pour apporter leurs connaissances sur cette période. Henri Michaud, directeur de l’école des garçons au village, ne mentionne pas le cas Cotte, donc pour lui, Honoré Cotte soit n’est pas résistant, soit n’est pas mort.
Sur le mémorial départemental de la Résistance en Drôme, situé à Mirmande et inauguré en 1995, aucune inscription de Cotte Honoré, de Cotte Eugène ou d’Eugène Mourier (Il y a un Eugène Mourier, mais il était beaucoup plus vieux et connu comme résistant et déporté)
Communiqué
Il est difficile de conclure, beaucoup trop d’incertitudes.
Si, par hasard, vous rencontrez Honoré Cotte ou Eugène Cotte ou Eugène Mourier, dites-lui qu’il reprenne contact avec la vie et qu’il laisse un message sur ce site. Merci