Intimidé, parce que je me trouve face à un "monument” que j'ai très longtemps admiré, et qui, à ma modeste mesure, m'a inspiré : il s'agit de Marcel BARBU que nous honorons aujourd'hui.
Vous êtes nombreux ici à l'avoir côtoyé, à l'avoir connu : mon témoignage risque donc d'être un peu pâle par rapport à toutes les paroles qui ont été prononcées jusque-là par ses amis - je n'ose pas employer le mot disciples.
Je ne reprendrai donc pas l'historique de la vie de Marcel BARBU, ni celui de la Communauté BOIMONDAU qui y est étroitement lié. Vous l'avez fait avant moi, bien mieux que je n'aurais pu le faire.
Je voudrais simplement, en quelques mots, vous dire ce qu'un "homme” de ma génération ressent face à Marcel BARBU. Je reprendrai 1'article premier des Buts de la Communauté de Travail :
"C'est l'épanouissement social des personnes qui la composent. Cet épanouissement est à la fois matériel, moral et intellectuel".
La citation est courte, mais va à l'essentiel. Marcel BARBU est parvenu à concilier ce que chaque humaniste recherche comme le GRAAL : mettre la réflexion à l’épreuve de l'action. Passer de la théorie à la PRAXIS, en un mot, réaliser l'utopie.
Évidemment, tout cela ne se fait pas d'un coup de baguette magique : Il lui a fallu du temps, de la patience, de la détermination et des tonnes de courage, car les forces d'inertie, sans parler des pièges, ne manquaient pas.
Son esprit d'entreprise, au sens noble du terme, l'a mené de St-LEU- LA FORET à SANNOIS, dans le Val d'Oise, en passant par Besançon, Valence et Combovin, itinéraire ponctué par quelques séjours en prison et, comble de 1' horreur, une année au Camp de Buchenwald.
Mais Marcel BARBU avait une telle soif de vivre et de faire vivre qu'il savait tirer profit de l'adversité.
L'expérience de BOIMONDAU, mais peut-on parler d'expérience lorsque l'aventure a duré plus de trente ans, en est l'exemple vibrant. Je laisserai à Albert CAMUS le soin d'en parler :
"Il y a une Communauté dont on a beaucoup ri dans les journaux, à tort à mon sens. Cela s'appelle la Communauté BARBU. Vous avez là l'exemple type de cent cinquante individus qui, lassés d'attendre pour la quatrième génération le triomphe de l'histoire, se sont réunis et ont réalisé entre cent cinquante, un état de choses où ils mènent une vie digne, qu'ils reconnaissent eux-mêmes comme étant digne.
Vous avez là l'exemple de gens qui ont tourné le dos à ce qui leur semblait mauvais. Il y a dans le statut que la Communauté ne reconnaît comme lois imposées que le cadre provisoire où elle se trouve, que celles qui sont conformes aux principes édictés par ses règles. C'est une marque frappante de la volonté d'individus qui se désolidarisent de ce qu'il y a de mauvais et continuent dans la société ce qu'il y a de bon".
Marcel BARBU c'était l'espoir : espoir d'un monde du travail nouveau, d'un monde nouveau, où l'homme, la femme, n'est pas considéré comme un pion, mais partie d'un tout et tout d'une partie.
Aujourd'hui, cet espoir a quelque peu disparu, surtout dans les rangs de notre jeunesse. Je pense qu'il est indispensable d'aller rechercher dans son exemple non pas un modèle, mais un idéal qui permettra à notre société de retrouver pourquoi les hommes se rassemblent :
— Le progrès dans l'épanouissement.
Monsieur BARBU (fils), au nom de la Municipalité de VALENCE, j'ai le grand privilège de vous remettre cette médaille honorant votre père à titre posthume.
Je souhaite que tous ceux qui l'ont connu et qui ont partagé son idéal, ses joies comme ses souffrances, se sentent associés dans cet hommage.
Après son allocution, Louis Chevalier remet la médaille de la ville de Valence à Jacques Barbu