Le décret qui suspend le général n’a pu être rapporté, malgré les démarches de ses concitoyens. La Société populaire le recommande donc de nouveau, aux Jacobins de Paris dans les termes suivants :
Les frères d’Étoile, qui ont l’avantage de vous être depuis longtemps affiliés, se font gloire de vous devoir le développement énergique des principes de civisme qui germaient dans le cœur de chacun de ses membres. Longtemps, en effet, avant la Révolution, notre haine fortement prononcée pour la tyrannie et ses exécrables suppôts, avait, fait donner à la commune d’Étoile le surnom de PETITE RÉPUBLIQUE.
C’est sous nos murs que s’est formée, d’ailleurs, la première des fédérations civiques. Zélés initiateurs de nos voisins les Jacobins de Valence, qui se sont si fièrement montrés depuis cinq ans dans la marche hardie de la Révolution, aucune commune n’a rempli avec plus d’ardeur tous les actes de patriotisme, et nous pouvons dire, dans l’effusion de nos cœurs, que chaque occasion de dévouement a été pour nous, une fête nouvelle.
Cultivateurs, laboureurs, mais pauvres, et constamment opprimés de prédilection par d’infâmes publicains, connus sous le nom abhorré d’intendants ; manquant souvent de pain, il a été donné à peu de nous les moyens de soigner leur éducation ; mais la pénurie de l’ancien régime et ses vexations multipliées n’ont fait que préparer nos âmes d’une manière plus active à l’heureuse régénération dont nous commençons à jouir grâce à l’admirable sollicitude de la Convention nationale, que vous avez si énergiquement secondée.
Comme nos redoutables ancêtres, les Gaulois, nous sommes simples, mais fiers et infatigables. Si nous écrivions à d’autres qu’à nos frères, nous regretterions, peut-être, l’art souvent abusif de bien tourner une phrase ; mais nos actions parlent pour nous. 0n se rappellera toujours avec enthousiasme ceux qui, les premiers, ont osé donner le branle à la Révolution !
Sans rien présumer des longs et utiles services du citoyen FONTBONNE, natif de cette commune, ainsi que de sa bonne réputation, nous vous exposons qu’il a été suspendu provisoirement de ses fonctions comme noble, malgré qu’il n’ait jamais fait partie de cette caste justement prescrite ; que son père, parti simple soldat au régiment d’Auvergne, parvint, au bout de vingt ans, au grade de capitaine et à la décoration militaire; mais, qu’il est le premier de sa famille qui se soit tant avancé ; que ses ancêtres étaient tous roturiers, cultivateurs ou adonnés aux arts mécaniques.
Nous observerons, encore, que le citoyen FONTBONNE fils, dont il est ici question, député aux assemblées de Romans et de Vizille, ne vota jamais avec les nobles ; qu’il est très estime de tous pour son patriotisme soutenu et son courage à la guerre, qui l’a porté au grade de général de brigade après trente-sept ans de service et onze campagnes ; que sa belle conduite en Belgique lui a mérité les félicitations de la Convention nationale.
Pour ces motifs, la Société populaire d’Étoile, croit bien mériter de la Patrie en vous dénonçant l’erreur ou l’injustice dont le citoyen FONTBONNE a été victime de la part d’un ci-devant ministre.